Débat de Politique départementale – Intervention de Sébastien JUMEL

Débat de Politique départementale – Intervention de Sébastien JUMEL

Débat de Politique départementale – Intervention de Sébastien JUMEL

EDF – GDF

En voulant remettre en cause les statuts d’E.D.F et de G.D.F au prétexte de l’ouverture à la concurrence du « marché » de l’énergie, le gouvernement remet en cause l’audacieuse politique énergétique du pays mise en place à la libération en 1946 par le Général de Gaulle et Marcel Paul, qui avaient su mettre en place les outils d’un secteur public puissant pour assurer la relance industrielle de notre pays, tout en assurant notre indépendance énergétique, prolongée par la création de la filière nucléaire à partir des années 60-70.

La maîtrise publique du secteur de l’énergie a été sans conteste durant ces 5 dernières décennies un moteur du développement économique et social du pays en même temps qu’elle garantissait une véritable égalité de traitement entre les usagers.

Mais il y a déjà bien longtemps que l’Europe libérale, avec la complicité des gouvernements, lorgne sur les services publics, et sur celui de l’énergie en particulier.
En 1997, la France donne son accord au projet de « directive gaz » qui doit être adoptée en juin 1998.
Pour préparer le terrain, l’Etat transfère dès 1997 à EDF les lignes à haute tension dont il est propriétaire depuis 1946.
En 2000, il confie l’exploitation de ces lignes à « Réseau de Transport d’Electricité » pour permettre leur utilisation par des opérateurs mis en concurrence.
La même année, il vend à GDF les 29 000 kms de gazoducs qu’utilise l’entreprise (à l’arrivée, c’est le contribuable qui paye la facture en réglant sa note de gaz : depuis, le prix du gaz facturé aux particuliers a augmenté de 31,7%).
Le 16 mars 2002, le Conseil Européen de Barcelone lance la « phase finale de l’ouverture des marchés de l’électricité et du gaz », sans aucune opposition.

Mais pour quel résultat ?
Combien d’entreprises qui avaient fait le choix d’un fournisseur concurrent d’EDF cherchent aujourd’hui, face à une augmentation de 48% du prix de l’électricité, à revenir dans le secteur public ? Et combien de milliards d’euros ont été gaspillés dans toutes ces fusions-acquisitions ?
Au moment où la droite ose faire du pouvoir d’achat son nouveau combat, il faut avoir l’honnêteté de dire aux français que les prix du gaz vont augmenter. Ils vont augmenter parce que les actionnaires du groupe issu de la fusion Suez-GDF vont exiger, à l’instar de tous les actionnaires, de fortes rémunérations.
Les prix vont aussi augmenter parce qu’au nom de la concurrence, la commission européenne veut remettre en cause l’existence de contrats d’approvisionnement à long terme, qui sont autant de garanties pour notre sécurité et notre indépendance énergétique que pour la stabilité des prix.
Amputé par l’absence de partenaire gazier, EDF sera clairement fragilisé par ce nouveau concurrent. En absorbant GDF, Suez met la main sur un portefeuille de 11 millions de clients. 11 millions de clients à qui le groupe fusionné pourra proposer une offre duale gaz et électricité au détriment d’EDF.

Quand la logique du privé s’installe, la dictature des actionnaires aboutit inéluctablement à faire des économies sur la maintenance des installations par un recours à une sous-traitance de moins en moins adaptée, à remettre en cause la sûreté des installations et la sécurité des salariés comme des populations.

Notre Département de Seine-Maritime, exportateur d’énergie électrique, représente à lui seul les 2/5 de la production d’électricité d’origine nucléaire française avec les deux centrales de Paluel et Penly, et dispose d’une centrale thermique au Havre. Il y a 2000 électriciens-gaziers en Seine-Maritime. C’est dire nous sommes particulièrement touchés ici par cette politique de libéralisation du secteur de l’énergie, qui remettrait en cause la distribution, la fourniture, l’entretien des réseaux, leur extension et leur modernisation permettant à chaque habitant l’égalité de traitement en terme de qualité, et qui remettrait aussi en cause l’égalité d’accès en terme de coût avec la fin de la péréquation tarifaire.

Aujourd’hui, la gauche dans son ensemble doit prendre l’engagement clair, sans ambiguïté, de créer un pôle énergétique public en fusionnant EDF et GDF renationalisées.

Le texte sur la fusion GDF-Suez est examiné à partir d’aujourd’hui par le Sénat.
Le groupe communiste au Sénat a annoncé qu’il déposait une motion référendaire pour que le peuple français décide de l’avenir de l’entreprise publique. Sur cette question qui touche à l’indépendance nationale, le peuple doit exercer sa souveraineté.

Depuis 2 ans, le Département s’inscrit comme un pôle de résistance aux politiques libérales et comme un laboratoire d’une véritable politique alternative, authentiquement de Gauche, en testant sur notre territoire des mesures concrètes avant de les mettre en œuvre au plan national (fonds de garantie et de caution des loyers, « malus » pour les communes qui ne respectent pas le 20% de logements sociaux, amélioration des conditions d’accueil dans les Ehpad, politique volontariste pour les collèges…)

Compte tenu de la place que tient notre département au plan national dans le secteur de l’énergie, je vous propose que nous réfléchissions aux modalités d’une consultation de type référendaire pour que les habitants de Seine-Maritime se prononcent directement sur le devenir de EDF et de GDF et sur la constitution d’un pôle énergétique national à 100% public. L’idée étant, vous l’avez compris, de peser avec force sur le débat national.

Je ne doute pas que notre position entrainerait l’adhésion de la population.

Sébastien JUMEL
Vice-président du Conseil Général de Seine-Maritime