L’avenir du port de Dieppe : un enjeu majeur de l’aménagement du territoire.

L’avenir du port de Dieppe : un enjeu majeur de l’aménagement du territoire.

Lettre de Sébastien JUMEL, vice-président du Conseil Général à

Monsieur Dominique PERBEN
Ministre des Transports, de l’Equipement, du Tourisme et de la Mer
Paroi Sud
92055 PARIS LA DEFENSE Cedex

Objet : L’avenir du port de Dieppe : un enjeu majeur de l’aménagement du territoire.

Monsieur le Ministre,

Le port de Dieppe, atout essentiel pour la métropole d’équilibre qu’est cette ville en Haute Normandie, connaît une situation très grave.
Le licenciement des 47 dockers confirme qu’il y a un risque réel de disparition de sa fonction de port de commerce.
Il apparaît aujourd’hui évident que le groupe Belge Sea Invest a racheté l’opérateur Léon Vincent pour détourner des trafics traditionnellement acquis à la place dieppoise.
Disparition de trafic qui a déjà un effet en chaîne sur l’ensemble de l’emploi portuaire et peut menacer des industries, notamment agro-alimentaires, qui lui sont liées.
Il est évident que l’Etat, le port d’intérêt national étant encore actuellement placé sous sa compétence, porte une part essentielle de responsabilité dans la situation actuelle.
Il entend de plus utiliser les lois de décentralisation Raffarin pour se débarrasser du port de Dieppe sans assumer toutes les conséquences de ses choix, c’est inacceptable.
Il n’y a en effet aucune fatalité à ce que le port de commerce disparaisse au profit d’une fonction dominante dédiée à la plaisance. Les propositions avancées pour développer sa fonction commerciale doivent être soutenues.
L’acceptation, par notre région, du transfert de la compétence portuaire se concrétisera désormais dans moins d’un an. Compte tenu de la place qu’a pris le Département dans le développement du Transmanche, cela invitera à trouver une solution originale de collaboration étendue aux collectivités locales et associant des partenaires.
Je conçois cette nouvelle donne comme un moyen pour insuffler du dynamisme à la fonction portuaire de la région dieppoise et à l’emploi qui lui est lié.
Dans notre esprit, cela est conditionné par la mise en œuvre effective et rapide d’une complémentarité nouvelle entre les ports de Haute Normandie. Il n’y a aucune raison pour qu’il y ait concurrence entre ces ports de tailles différentes. Port 2000 au Havre, les nouveaux développements du port de Rouen ont bénéficié d’importants engagements financiers publics de l’Etat. La région et le département ont apporté eux-mêmes des participations considérables, il est naturel qu’en retour cela bénéficie à toute l’économie portuaire du département et de la région.
Construire l’avenir du port de Dieppe, c’est donner toute sa portée à la complémentarité des ports normand et donner une réalité aux 4000 emplois dont sont porteurs ces projets.
Cette nouvelle complémentarité implique qu’elle soit organisée sur toute la façade maritime de la Haute Normandie, de la Baie de Seine à la Vallée de la Bresle.
De ce point de vue, Il convient d’agir concrètement pour inciter et veiller à la construction de synergie et de complémentarité entre les différents ports pour le développement du méroutage, du cabotage, de l’occupation de toutes les niches, si modestes soient-elles, de trafics… C’est le chemin de l’avenir.
Cela permettrait le renforcement de notre vocation maritime et portuaire en offrant la totalité de la gamme des services qu’on peut attendre de cette diversité. Dans l’immédiat cela résorberait les effets de goulets d’étranglement qui découlent de la croissance rapide des échanges mondiaux en particulier par containers. A plus long terme, les diversités des lieux et des modalités d’accueil du fret accroîtraient notre place en Europe et dans le monde.
Concernant directement le port de Dieppe :
J’ai été profondément choqué et indigné par les propos de Monsieur le Préfet qui ont été rapportés dans la presse concernant la région dieppoise :
« bien sur, l’Etat ne va pas injecter de l’argent dans ce seul axe de développement (Port 2000). Mais toujours dans le domaine portuaire, il n’y aura par exemple aucune injection de l’Etat pour faire revenir d’éventuels trafics dans le port de commerce de Dieppe » (Paris Normandie 22 mars 2006).
Le bulletin Fil Fax de ce même 22 mars indique pour sa part : « reste en fin du présent contrat dont le Préfet a annoncé qu’il sera respecté « au centime près » sauf pour ce qui s’avère inutile. C’est le cas notamment du port de Dieppe pour sa partie commerce fruitier car il n’y a aucun avenir, a indiqué en substance le Préfet de Région ».
Ces déclarations constituent une véritable provocation à l’égard des acteurs économiques, des partenaires sociaux qui continuent au plan local à rechercher des solutions pour recréer une activité portuaire commerciale, mise à mal par la stratégie des multinationales du transport et du commerce maritime.
Je pense au contraire, et ce sentiment est partagé par l’ensemble des acteurs économiques et sociaux locaux, qu’il y a urgence à une remise à niveau de l’outillage portuaire dieppois ainsi qu’à achever ses liaisons routières, en particulier la RN 27. Cela est naturellement exigible à l’égard de l’Etat dans le processus de transfert.
Je pense qu’il faut faciliter, y compris par une procédure d’aide, tout projet de reprise de l’opérateur historique : c’est l’urgence.
Je réitère ma demande que sous votre autorité soit réuni rapidement un comité de pilotage stratégique du port de Dieppe.
Monsieur le Ministre,
Dieppe souffre et risque – si l’on n’inverse pas la donne – de perdre son âme, sa force de vie, son rayonnement.
Les dieppois croient en l’avenir de notre ville et de son port. Des pistes d’actions et de solutions sont déclinées. L’Etat doit les entendre et y répondre.
J’ai souhaité profiter de votre présence en Normandie pour vous interpeller publiquement sur ce sujet primordial.
Je serai présent demain à l’inauguration de Port 2000 et vous remettrai ce courrier en main propre.
Dans l’attente d’une réponse,
Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’expression de mes sentiments respectueux.

Sébastien JUMEL

Conseiller général
Vice-Président du Département de Seine-Maritime