Intervention de politique régionale du 18 mars 2013

Intervention de politique régionale du 18 mars 2013

Conseil régional de Haute-Normandie

Session du 18.03.2013

Intervention de politique régionale

Céline BRULIN – Front de Gauche

Monsieur le Président,

Chers Collègues,

C’est dans un climat social lourd que se réunit notre assemblée plénière. Dans un climat où nos concitoyens doutent de plus en plus que le changement attendu se concrétise. 

Les salariés de Pétroplus sont dans l’inquiétude à l’approche de la date fatidique du 16 avril, à mesure que de potentiels repreneurs sont jugés défaillants.

Je veux redire ici, que si aucun repreneur ne recueille le soutien de l’État, alors, il faudra que celui-ci prenne ses responsabilités en allant, s’il le faut, jusqu’à la nationalisation, car l’indépendance énergétique de notre pays est en jeu. 

D’ailleurs, au moment où certains ministres proposent de taxer plus fortement le gasoil – comme si une fois taxés les diesels ne seraient plus un problème de santé publique ! – au moment où s’ouvre un débat sur la transition énergétique, pourquoi faudrait-il exclure, a-priori, la création d’un pôle public de l’énergie permettant de maîtriser notre politique énergétique ? 

Oui, des interventions fortes sont attendues. Faute de quoi le sentiment que l’action politique, que l’action publique sont impuissantes risque de grandir.

Pouvons-nous, nous toutes et tous, et je m’adresse plus particulièrement à mes collègues de la majorité de gauche et écologiste, laisser gagner ce sentiment avec tous les risques que cela comporte, pour la gauche et les valeurs que nous défendons, et au-delà, pour notre pays ?

Il ne faut pas accompagner le MEDEF et la droite dans leur volonté obstinée de détruire notre modèle social. Il faut au contraire mieux protéger ceux qui chez Renault, Révima ou Cooper sont confrontés à un patronat à l’offensive comme jamais.

Les 7500 suppressions d’emplois décidés par le groupe Renault représentent autour de 2000 emplois de moins en Haute-Normandie. Quel recul de la place de l’industrie automobile dans notre région pourtant filière d’excellence !

Et croyez-vous que les salariés qui ont voté pour des parlementaires socialistes vont admettre que ceux-ci mêlent leurs voix à celles de la droite, sous les applaudissement du MEDEF, pour transcrire un accord signé par des syndicats minoritaires qui les fragilisera davantage, dans les grands groupes comme dans les PME  ?

Pouvons-nous offrir comme seul horizon la réduction des dépenses publiques et l’austérité ?

L’argent public n’est rare, Monsieur le Président, que parce que depuis des années, des choix politiques ont considérablement allégé la contribution financière des grands groupes et des privilégiés au développement de notre société.

Le gouvernement précédent à excellé en la matière. Chacun sait, ici, combien la suppression de la Taxe professionnelle a grévé le budget des collectivités.  Nous l’avons dénoncé en son temps.

Mais offrir aujourd’hui 20 milliards de crédit d’impôts, sans contrepartie, n’est-ce pas dilapider l’argent public ? N’est-ce pas céder au privé, sans garantie en matière d’emploi, des moyens qui seraient pourtant fort utiles pour mener des politiques publiques ?

D’après la presse, Monsieur le Président, vous n’êtes pas hostile à la fusion des deux conseils généraux haut-normands avec la région ? Quel zèle, au moment où l’acte III de la décentralisation suscite bien des interrogations !

Doit-on y voir l’expression de votre légendaire esprit de concertation ? Dans la « conférence territoriale », prévue par le projet de loi, vous auriez en effet affaire à moins de partenaires, mais la démocratie y gagnerait-elle ?

Oui nous avons des inquiétudes sur ce projet de loi. En matière de transports, par exemple, compétence majeure de notre collectivité.

Car l’État se désengagerait de sa mission d’aménagement du territoire en abandonnant en grande partie sa responsabilité d’Autorité Organisatrice de Transports et en tentant de transférer des liaisons ferroviaires importantes, la liaison Paris-Rouen-Le Havre notamment, aux régions.

Comment ne pas en être inquiet quand s’exprime au contraire la nécessité d’un effort national pour développer les infrastructures, comme la LNPN,  nécessaires à notre région et à notre pays, notamment en raison des besoins de développement de nos  2 Grands Ports Maritimes ? Comment accepter que la Haute-Normandie puisse être tenue à l’écart du réseau haute performance alors que tout le monde convient de notre retard ? 

Inquiétudes aussi en matière de formation professionnelle où les pouvoirs des régions seraient renforcés. Et nous ne brillons pas toujours dans ce domaine. La Région Haute-Normandie est ainsi la seule Région avec la Franche-Comté à avoir supprimé la subvention restauration à l’AFPA.

Et vous ne voulez pas non plus entendre, Monsieur le Président,  que le code des marchés publics ne s’applique pas à des formations gratuites pour les bénéficiaires, financées sur fonds publics et aboutissant à un diplôme reconnu par l’État, ce qui est le cas pour de nombreuses formations dispensées par l’AFPA. 

En matière de formation, toujours, notre collectivité met en œuvre le contrat d’accès à la qualification pour « raccrocher » les jeunes, très nombreux dans notre région, qui ne disposent pas du premier niveau de qualification. Très bien !

Mais comment dans le même temps accepter et accompagner, la fermetures de  formations de niveau V ou de filières dans les lycées professionnels et technologiques de notre académie, alors même qu’elles permettent aux jeunes, notamment des milieux populaires, de se former et de poursuivre des études longues.

Je me permets d’ailleurs de vous demander de répondre à la sollicitation de l’intersyndicale des Lycées Professionnels qui souhaite vous rencontrer pour débattre de la carte des formations 2013.

Au moment où le président de la République souhaite inscrire la nécessité du dialogue social dans la Constitution, comment les enseignants pourraient-ils interpréter un refus de votre part ?

Nous n’avons pas d’hostilité de principe à l’égard de l’apprentissage. Mais nous considérons qu’il ne peut remplacer les formations dispensées dans le cadre de l’éducation nationale. De plus, dans le contexte de crise que nous connaissons, il est parfois très difficile pour les jeunes de trouver une entreprise pour la formation en alternance.

Nous considérons aussi qu’il ne doit pas être mis au service de la casse d’outils performant comme l’AFPA. L’Association des Régions de France a par exemple fait le constat d’une forte diminution des formations industrielles au sein de l’AFPA : -16% en un an. Cela pose la question du maintien de la compétence dans la durée, note très justement l’ARF.

Les explications pourraient être trouvées, dans certaines régions, dans la concurrence entre les voies de formation et le développement, par exemple, de l’apprentissage sur des formations industrielles.

Voilà pourquoi nous demandons qu’un bilan global des formations soient réalisé dans notre région. Un bilan qui pointe les différents types de formations proposées, leur nature, leur statut, les résultats obtenus et le taux d’insertion dans la vie professionnelle.

C’est indispensable, non seulement pour orienter notre politique régionale mais aussi pour promouvoir, y compris auprès des jeunes et de leurs familles les formations qui le nécessite.

Nous pensons évidemment au secteur industriel. Car un véritable redressement productif exige le développement de la formation. Nous pensons aussi au secteur de l’aide à la personne où les besoins de qualification sont immenses, notamment dans la perspective du chantier de la dépendance et de la perte d’autonomie.