La ligne Nouvelle Paris Normandie

La ligne Nouvelle Paris Normandie

La ligne Nouvelle Paris Normandie (LNPN) : outil de développement ou de déménagement de territoire

Un Colloque intitulé Axe-Seine II se tiendra lundi prochain, 23 mai au Zénith de Rouen. Grand messe organisée en tables rondes avec les ténors des Régions de haute, Basse-normandie et d’ïle de France, la voix communiste peinera à s’y faire entendre tant les temps de parole seront écourtés et les interventions limitées. C’est la raison pour laquelle une conférence de presse se tenait lundi, 16 mai à Rouen avec la participation de N Levillain, maire de Tourville la rivière, vice-président de la région de Haute-Normandie en charge des transports, M Barrier, vice-président du CG76 et JL Lecomte, conseiller régional et maire-adjoint de Vernon sur les propositions, attentes et exigences des élus communistes et des populations quant au projet dit Axe-seine..

Dans son propos introductif, N Levillain soulignait que « lors de sa visite au Havre, le Président de la République est revenu sur la nécessité de mobiliser les énergies autour de l’axe Seine.

Son propos s’est fait insistant sur le projet de création d’une ligne ferroviaire nouvelle mettant les deux grands ports maritimes que sont le Havre à 1 h 15 de Roissy, et Rouen à 45 minutes, ainsi que Caen à 1 h 30 de Paris.

Cette volonté de focaliser le débat essentiellement sur le développement d’une ligne à grande vitesse entre Paris et le Havre et plus aléatoirement vers Caen, constitue une indication sur la conception d’aménagement de l’axe Seine, sur le rôle et la place que l’on entend donner à notre région dans la construction du Grand-Paris.

Les grandes lignes du projet qui ont fait l’objet d’une présentation lors du colloque à l’initiative de Messieurs Laurent FABIUS, Bertrand DELANOE et Antoine RUFENACHT, organisé en mai 2010, se précisent aujourd’hui.

Les deux grands ports maritimes que sont le Havre et Rouen, de même que la construction d’une infrastructure ferroviaire nouvelle à grande vitesse, apparaitraient avant tout comme des outils de valorisation de la région Ile de France afin de la placer en pole position dans la compétition que se livrent les grandes métropoles européennes.

Cette conception, qui donne la priorité à l’aménagement de l’axe Seine, se ferait au détriment d’un développement et d’un aménagement harmonieux de l’ensemble des territoires Hauts-Normands, mais aussi Bas-Normands et accentuerait les déséquilibres observés aujourd’hui tant au plan économique que social……

Concernant plus précisément le projet de ligne nouvelle Paris/Normandie, poursuivait N Levillain un constat s’impose : Grand-Paris ou pas, il est urgent de se mettre au chevet de l’ensemble du réseau ferroviaire normand et, dans ce cadre, d’apporter une attention toute particulière à l’axe Paris/Le Havre qui évidemment en constitue la colonne vertébrale.

L’état actuel de vétusté de la ligne et en particulier de son infrastructure, de son matériel roulant, de même que la médiocre qualité de service qui en résulte et porte atteinte à la compétitivité des entreprises, handicape quotidiennement des milliers d’usagers voyageurs.

Cette situation appelle des réponses immédiates et n’est pas compatible avec le calendrier envisagé pour la réalisation de la ligne nouvelle (horizon 2020).

Par ailleurs, il serait inconcevable que l’avènement de la grande vitesse ne concerne qu’une partie de la population, celle située à proximité de cet axe.

Dès à présent, des études doivent être menées et des moyens alloués pour moderniser le réseau régional et améliorer ainsi ses performances.

Il serait inconcevable que les gains de temps obtenus grâce à la ligne nouvelle à grande vitesse soient neutralisés par des contraintes dues à l’état du réseau, à des correspondances inadaptées….

D’où nos propositions d’aménagement de certaines lignes régionales pour en améliorer le débit, accroître les performances commerciales, bref rendre de meilleurs services aux usagers et faire profiter le maximum (temps de parcours diminués, accessibilité au réseau Grande-Vitesse national et européen),

Le fret ferroviaire

Nous constatons que la priorité est donnée à l’acheminement du trafic fret en provenance et à destination des deux grands ports hauts-normand.

Aussi la réflexion engagée ne porte que sur la partie infrastructure et ne concerne que deux axes :

  • 1 – L’aménagement et la modernisation de la ligne Serqueux/Gisors (région parisienne) en complément de l’axe Motteville/Montérolier-Buchy, récemment modernisé et remis en service afin d’acheminer le fret du port du Havre. Cet axe constitue un itinéraire de délestage à la ligne Paris/le Havre aujourd’hui saturée.
  • 2 – La ligne Paris/le Havre actuelle qui, après construction de la ligne nouvelle et report de l’essentiel du trafic voyageur sur cette ligne autoriserait l’utilisation de sillons de fret supplémentaire.

Cette vision du Fret ferroviaire appelle plusieurs remarques :

Alors que le grenelle de l’environnement est sensé inciter au report du trafic routier vers des modes plus respectueux de l’environnement (au sens large du terme) tels que la voie d’eau, le cabotage maritime, le chemin de fer, aucune approche des trafics résultant des centres de production autres que les ports du Havre et Rouen, n’est envisagée.

Aucune réflexion n’est engagée sur les infrastructures qu’il conviendrait d’aménager et de développer dans cet objectif de report modal.

Cette approche est donc restrictive.

Elle exclut de fait les trafics diffus qui, du fait des évolutions structurelles apportées aux appareils de production et de commercialisation, sont en augmentation constante.

Notre volonté d’approfondir la réflexion sur ce sujet nous amène à poser la question des équipements à mettre en place pour absorber les trafics nouveaux issus de ce transfert modal.

Dans ce cadre, le rôle des centres de traitement du trafic fret et notamment le réseau de gares de triage, et pour ce qui nous concerne, le triage de Sotteville, doit être étudié.

Elle nous amène également à nous interroger sur le rôle des nouveaux opérateurs ferroviaires qui, aujourd’hui, pour des raisons de rentabilité, se cantonnent à des trafics bien précis sur les axes bien définis.

Il ne fait aucun doute que le schéma actuel qui s’affine en privilégiant les trafics maritimes sur les axes retenus pour constituer le futur réseau ferroviaire fret européen, s’adresse avant tout à ces sociétés privées, le plus souvent filiales de grands groupes industriels.

La rigidité de leur organisation, qui est une résultante de leur stratégie de rentabilité, s’oppose à la nécessaire souplesse pour adopter l’outil ferroviaire aux besoins multiples de transport de l’économie régionale et nationale.

La politique maritime

Le constat que nous venons de dresser concernant le schéma ferroviaire du Grand-Paris, conforte notre analyse sur la politique portuaire qui sera mise en œuvre autour des deux grands ports maritimes que sont le Havre et Rouen.

Le Grenelle de l’environnement, comme nous l’avons rappelé pour le fret ferroviaire, encourage au développement du cabotage maritime, des trafics côtiers, et à la mise en place d’autoroutes de la mer. Il met en exergue le réseau portuaire de nos côtes.

Une cohérence politique implique que les ports dits secondaires que sont Dieppe, Fécamp, le Tréport, pour ce qui concerne la Haute-Normandie, s’inscrivent dans cette perspective et que leurs installations soient prises en compte pour les mettre en situation de répondre à ces nouveaux enjeux.

Pour ces ports, tout comme pour les bassins d’emplois situés hors axe Seine, la connexion au réseau routier national et international ainsi qu’au réseau ferroviaire constitue une nécessité pour procéder à leur désenclavement et compenser les déséquilibres économiques et sociaux actuels.

Cette prise en compte d’un développement équilibré de l’ensemble des territoires hauts-normands est visiblement en contradiction avec les intentions et les choix affichés par les concepteurs du grand Paris. Elle est pourtant nécessaire.

Les limites d’un grand Paris, s’appuyant pour son rayonnement, sur les opportunités que représentent les deux grands ports hauts-normands, ainsi que sur la construction d’une ligne ferroviaire à grande vitesse et qui, dans le même temps, occulterait l’ensemble des potentialités des territoires concernés à mettre en œuvre, seront vite atteintes.

A contrario, la prise en compte des potentialités existantes, leur inscription dans le projet, lui donnerait une toute autre dimension en favorisant son dynamisme économique et social au service des entreprises, de l’emploi, des populations.

Ce dont ces derniers ont besoin, c’est moins d’un grand Paris, capitale financière et boursière, mais d’une région parisienne œuvrant avec les régions limitrophes au développement de leurs territoires.

D’autres choix sont nécessaires, ils sont possibles, à la condition de mettre en œuvre une autre politique répondant aux enjeux de ce siècle – enjeux sociaux, enjeux environnementaux ».

Dans le débat qui s’instaura avec les journalistes présents, N Levillain précise que pour lui l’axe seine est une nécessité majeure mais il s’interroge : les habitants auront-ils leur mot à dire et ce .projet sera-t-il un outil de développement ou de déménagement du territoire. Michel Barrier insistait sur la prise en compte de la dimension humaine de ce projet tant en matière d’urbanisme, d’activité économique, de formation soulignant la nécessité d’organiser le débat le plus large possible avec les départements et régions limitrophes et les citoyens des territoires concernés.

Jean-luc Lecomte précisait la volonté des élus communistes de maintenir l’activité industrielle et d‘investir le champ de la multimodalité des transports.

L’ensemble de ces axes seront dans la mesure du possible traduit par les élus communistes qui participeront aux tables rondes du colloque axe-seine II, lundi prochain et débattus partout, ensuite, ou l’opinion citoyenne sera nécessaire et sollicitée.

Philippe JOUVIN

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De gauche à droite sur notre photo : JL Lecomte, N Levillain et M Barrier.