la réforme des collectivités locales en débat…

la réforme des collectivités locales en débat…

Mieux vaut renforcer les moyens des collectivités locales plutôt que remettre en cause leur existence
Le Président de la République a annoncé l’engagement d’une réforme des collectivités locales. Selon lui, « Le moment est venu de poser la question des échelons de collectivités locales dont le nombre et l’enchevêtrement des compétences est une source d’inefficacité et de dépenses supplémentaires. La compétitivité de notre économie est capitale. Elle ne peut supporter un poids excessif de dépenses publiques. » Très bien, mais qu’en est-il réellement ?
En quoi supprimer un échelon de collectivité locale, le Département, comme le proposait il y a peu la commission Attali, va-t-il améliorer la vie de nos concitoyens ? Et qui peut réellement croire que la réduction du poids des dépenses publiques serait sans impact sur la qualité du service public rendu aux usagers ?A l’heure où une crise économique va succéder à la crise financière, il est particulièrement dangereux de vouloir fragiliser les collectivités locales, qui assurent 75% de l’investissement public de notre pays.
Elles ont déjà été déstabilisées par la mise en place de l’acte II de la décentralisation et par les charges importantes qui leur ont été transférées avec des financements très insuffisants pour les compenser. En seine Maritime, la dette de l’Etat envers le Conseil général s’élève importante. Aujourd’hui, les collectivités locales, communes, départements, régions constituent de véritables espaces de démocratie de proximité fondée sur l’écoute et la réactivité.
Les élus locaux sont ceux auxquels nos concitoyens font le plus confiance pour les protéger, les soutenir et préparer leur avenir.
Les collectivités locales assument des responsabilités très importantes, que la loi leur a confiées. Je pense s’agissant du Département à l’action sociale en faveur des personnes fragilisées par l’âge, la maladie, le handicap ou l’exclusion, aux collèges, aux routes départementales, à la santé de la petite enfance…
Elles s’attachent également à développer des politiques innovantes, susceptibles de répondre directement aux besoins de leurs populations et de leurs territoires. En Seine Maritime, les élus communistes s’ attachent à faire de la lutte contre les inégalités sociales et pour le droit à une véritable qualité de vie pour tous, un objectif permanent.
Ceci nous a conduit à développer des politiques départementales volontaires dans de très nombreux domaines, le logement social, les transports,l’enseignement, les espaces verts et l’environnement, l’aménagement du territoire, le développement économique pour l’emploi, le sport, la culture… Sur ces terrains, nous agissons très souvent avec de nombreux partenaires, institutionnels, associatifs, économiques… C’est tout cela qui fait la richesse du service public local.
Faire des économies en remettant ces actions en cause, c’est mettre en péril des pans entiers de la vie quotidienne de nos concitoyens, c’est mettre à mal les fondements de la République, la liberté des collectivités locales, leur capacité à répondre aux attentes de leurs habitants, la démocratie de proximité et le travail de centaines de milliers d’agents territoriaux. Il n’est pas innocent que ces projets, totalement infondés et nocifs pour les français, voient le jour six mois après des élections qui en Seine Maritime ont conforté la majorité de gauche qui dirige le Département et au plan national ont constitué un sérieux revers pour le gouvernement.
A l’heure où tout devrait être fait pour protéger nos concitoyens contre les effets négatifs de la crise qui s’annonce, où au contraire les collectivités devraient être accompagnées pour pouvoir continuer d’investir et dynamiser l’économie de notre pays, pour mieux encore pouvoir mener à bien leurs missions, la seule réforme qui serait réellement utile serait une réforme de fond des financements.
L’Etat doit en effet cesser de considérer les collectivités locales comme financeurs de ses propres déficits. Les impôts locaux qui progressent sont pour l’essentiel le résultat des politiques gouvernementales qui demandent toujours plus aux collectivités et leur accordent de moins en moins de moyens.
Pourtant des moyens, le gouvernement semble en disposer. Il a su en trouver pour réduire les impôts des contribuables les plus riches. Il vient d’en trouver à travers la proposition indécente de débloquer 360 milliards d’euros pour « sauver » les banques victimes de leur course folle à la spéculation. Réduire dans ce contexte l’action des collectivités locales reviendrait à faire payer par tous nos concitoyens les placements douteux d’une petite minorité. Il semblerait que le Chef de l’Etat ait confié à l’ancien premier ministre Edouard Balladur la présidence d’une commission chargée d’effectuer des propositions pour la reforme des administrations locales.
J’émets de très sérieux doutes quant à la légitimité d’une telle commission, composée essentiellement « d’experts » qui ne franchissent que très rarement les portes de leur bureau, ne représentent qu’eux-mêmes et dont la connaissance réelle de la vie de nos concitoyens et de l’action des collectivités locales mérite d’être confirmée.
Les premiers éléments connus quant à la composition de cette commission révèlent un manque certain de pluralisme. Il ne m’apparaît donc pas acceptable que l’avenir de nos collectivités, celui des habitants qui bénéficient de leurs services puisse être placé –en dehors de tout contrôle démocratique- entre les mains de technocrates dont le seul but est la réduction des services publics.
Au moment où toute l’énergie de la nation devrait être concentrée vers la recherche de solutions nouvelles, innovantes pour empêcher la crise économique de faire de nouveaux ravages, il est urgent de renforcer les collectivités locales, de leur accorder les moyens de leur action si utile à nos concitoyens plutôt que de remettre en cause leur existence.

Michel BARRIER

Vice Président du Conseil Général de Seine Maritime