Débat d’Orientation Budgétaire – Intervention de Claude COLLIN pour le groupe communiste

Débat d’Orientation Budgétaire – Intervention de Claude COLLIN pour le groupe communiste

Monsieur le Président, chers collègues,

Le traditionnel débat d’orientation budgétaire et la préparation du budget de notre Département pour 2007 ne peut évidemment faire abstraction du contexte socio-économique général de notre pays. Et on est en droit de se demander si à côté de la France du TGV, de la culture, des nouvelles technologies, il n’y a pas une France du Moyen Age, avec des privilégiés et des asservis.

La France des privilèges c’est par exemple :

  • Le PDG de LVMH avec 5,9 millions d’euros de gain annuel, + 6,4 millions de stocks-options
  • Le PDG d’ AGF avec 2,84 millions d’euros
  • Le PDG de Total avec 4,5 millions d’euros de revenu annuel
  • Le PDG de l’Oréal avec 7,36 millions d’euros de salaire, 35 millions de bonus, 12,9 millions de stocks options
En moyenne les dirigeants des entreprises du CAC 40 gagnent 400 fois le SMIC.

La France des privilèges c’est aussi ces mêmes 40 plus grandes entreprises françaises qui ont distribué 56 Milliards d’euros à leurs actionnaires pour les seuls premiers 6 mois de l’année.

Pendant ce temps-là, la France du Moyen âge c’est :

  • la moitié des salariés français qui gagnent moins de 1 484 € par mois et le travail précaire qui a progressé de 10 % en 2 ans,
  • c’est le nombre d’allocataires du RMI qui continue d’augmenter : + 4 % encore en 2006, soit 1,27 millions en France et plus de 27 000 en Seine Maritime, (plus 100 000 personnes supplémentaires aux minima sociaux),
  • c’est aussi la droite du Sénat qui vient d’ouvrir la  » chasse aux pauvres  » en adoptant, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, un amendement qui instaure le contrôle du train de vie des bénéficiaires des minimas sociaux et de la CMU !. Cette stigmatisation est choquante comparée à la mansuétude dont profitent ceux qui bénéficient des fonds publics ou qui profitent de la fraude fiscale !
  • la France du moyen âge c’est aussi 7 millions de pauvres, et l’INSEE vient d’indiquer que 6,9 millions de personnes vivent avec moins de 788 euros par mois, définis comme le seuil de pauvreté monétaire.

Certes, leur proportion a baissé depuis 1996 (passant de 13,5% à 11,7%) mais, précise l’INSEE, la tendance à la progression du niveau de vie, liée à une conjoncture favorable à la fin des années 90, (époque de la gauche plurielle) est  » en net ralentissement depuis 2 ans avec des taux de pauvreté qui ont arrêté de baisser « . (Et ça, c’est l’époque de la droite dure actuelle !)

  • Le moyen âge c’est encore 3 millions de mal logés selon la fondation Abbé Pierre, dans la 4ème puissance économique mondiale qu’est la France.
En clair, une France qui se smicarise et se précarise pendant qu’une minorité se gargarise

La banque alimentaire de Rouen vient ainsi d’enregistrer une hausse de 9 % du nombre des demandeurs souhaitant bénéficier de colis alimentaires, ils étaient 9 000 en 2005 ! Près de 800 personnes supplémentaires aujourd’hui voilà la réalité ! En France, les associations dénombrent 3 millions de personnes qui survivent grâce à l’aide alimentaire, dont ¼ sont des travailleurs ou des retraités.
Peut-on continuer de marcher ainsi sur la tête sans risque de véritable  » rupture  » ou de  » fracture  » ?
Va-t-on encore longtemps penser qu’il faut des riches pour nourrir les pauvres alors que se sont les pauvres qui créent la fortune des riches !

Alors qu’il y a de l’argent, on l’a vu, peut-on continuer de laisser l’Etat s’appauvrir volontairement par une baisse des impôts (qui profite aux plus riches) et par une politique d’exonérations de cotisations patronales pour les entreprises (23 Milliards d’euros), le dernier cadeau en date étant la décision de plafonner la taxe professionnelle de 3,5 % de leur valeur ajoutée à compter de 2008.

Peut-on continuer à laisser un Etat, pour accomplir ses missions de service public,  » s’approvisionner  » pour seulement 15 % sur les sociétés, pour 18 % sur les revenus et… pour 50 % de ses recettes par la TVA, cette taxe injuste qui touche proportionnellement plus les pauvres que les riches.

Moins d’Etat, redistributeur et régulateur, moins de services publics donc :

  • champ libre laissé au secteur privé, (même dans des secteurs pourtant stratégiques comme l’énergie avec GDF, ou les transports avec les autoroutes),
  • transferts des missions de services publics vers les collectivités locales, dont les Départements, via la  » décentralisation « , sans transferts de moyens financiers correspondants.

On le voit, la machine libérale est en marche qui touche la majorité des français et les collectivités locales, dont les finances sont étranglées.

L’an dernier, notre groupe avait estimé à 50 millions d’euros le désengagement de l’Etat et les charges transférées sur notre collectivité, et nous avions proposé de lui réclamer cette somme.

Aujourd’hui, c’est 84 millions que l’Etat doit à la Seine Maritime. Nous notons avec satisfaction que, comme nous le demandions, les sommes relatives au RMI seront inscrites au budget tant en dépenses qu’en recettes pour pouvoir réclamer cette somme à l’Etat par lettre de créance. Nous souhaitons que soient étudiées les possibilités de faire la même chose pour l’ensemble des sommes dues par l’Etat. Par ailleurs, demain, avec le plafonnement de la TP, ce sera encore 8 millions de recettes en moins pour notre collectivité. Il ne faut pas se le cacher : si rien n’est fait, le Département de Seine Maritime lui aussi, tôt ou tard, sera dans l’obligation d’augmenter les impôts, ou bien de s’endetter considérablement ou encore de réduire ses politiques en faveur des populations.

Si rien n’est fait, on va dans le mur.
Au-delà de la bataille pour réclamer nos 84 millions dus à la décentralisation, (et qu’il faudrait d’ailleurs mener chaque année), c’est une réforme en profondeur de la fiscalité et notamment locale qui est nécessaire.
On peut aborder le problème de 2 façons : ou bien il faut réduire les dépenses, pourtant nécessaires à la réponse aux besoins populaires, c’est la thèse libérale, ou bien il faut se doter de ressources, de recettes nouvelles, c’est notre conception.

Et contrairement à l’UMP et Nicolas SARKOZY qui envisagent d’aggraver les choses en exonérant les entreprises de toutes charges, l’ANECR, Association Nationale des Elus Communistes et Républicains, propose au contraire de prendre l’argent là où il existe bel et bien :
C’est le sens de la manifestation qu’elle vient d’ailleurs d’organiser avec succès ce 18 novembre à Paris avec plus de 2 000 élus et citoyens en colère.

Aussi, nous proposons ainsi de mettre à contribution les actifs financiers des entreprises.

Une précision : celles qui ont des actifs financiers ce ne sont pas les PME, les PMI ou les artisans, ce sont celles du CAC 40, les banques, les assurances !
En les faisant contribuer à un taux faible de 0,5 % (il leur en resterait encore 99,5 % ce qui ne les ruinerait pas !), cela rapporterait plus de 20 Milliards d’euros pour les collectivités locales, qui pourraient être répartis par une péréquation nationale solidaire. Ce serait socialement juste, efficace pour le développement des services publics afin de répondre aux besoins populaires, ce serait utile pour le développement de l’économie et de l’emploi.
Décider d’adapter la fiscalité à la réalité de l’économie d’aujourd’hui où la spéculation est devenue une source essentielle de création de richesses, c’est une question de volonté et de courage politique.
Au-delà de propositions comme l’augmentation de la CSG pour financer les dépenses de solidarité Nationale comme le RMI ou l’APA, qui selon nous ont le défaut de solliciter une nouvelle fois les revenus et donc y compris ceux des salariés et des retraités, nous appelons les associations d’élus qui ne l’ont pas encore fait à s’engager dans une voie réellement novatrice et antilibérale.

1 commentaire pour l’instant

jleveillard Publié le19 h 46 min - 20 décembre 2006

ce texte a le merite de la clarté car une politique sociale c’est avant tout une meilleure repartition de l’argent pour realiser et ne pas augmenter le deficit du budget national