Intervention de Jean-Paul LECOQ Conseiller Régional%%% Maire de Gonfreville l’Orcher Le développement économique : c’est bien un domaine qui doit bénéficier d’une priorité dans l’action régionale.
Les tendances les plus récentes ne semblent pas confirmer, en effet, l’évolution constatée d’un certain » rattrapage » de la région par rapport à la moyenne nationale en matière de chômage, même si ce rattrapage a effectivement fonctionné dans les années précédentes et, en tout état de cause, notre région doit toujours faire face à une situation particulièrement préoccupante, supérieure de près d’un point à la moyenne, avec un taux de chômage de 12,5% en Seine-Maritime (un peu moins de 10% dans l’Eure). Et l’examen de la situation de l’emploi dans les 9 bassins d’emploi principaux révèle des situations particulièrement contrastées, dans notre région toujours fortement marquée par l’emploi industriel, et par un emploi industriel en crise : L’INSEE a souligné la gravité de la situation dans ce qu’il appelle « les zones à la recherche d’un nouvel élan » que sont Fécamp, Dieppe, Bernay et la Vallée de la Bresle, les difficultés des zones d’emploi de Lillebonne et de Verneuil s’aggravant par ailleurs. Or, ce ne sont pas les tendances actuelles de la politique de l’emploi des entreprises régionales qui risquent d’inverser la tendance, on le sait : les entreprises, souvent grandes, qui licencient, réduisent l’emploi, restructurent, délocalisent ou menacent de délocaliser leur activité sont aujourd’hui au moins une vingtaine. L’opinion publique en a été saisie, citons dans le plus grand désordre : Retriever, Yorkshire, Gardy, Sidel, P&O, plusieurs entreprises de la Vallée de la Bresle dont Gamaver, les fonderies de Cléon, Ato-fina au Havre , Metra, Via Systeme, Soreni (Le Havre) et dans un secteur public de plus en plus menacé quand il n’est pas déjà cassé : France Télécom, la Poste, les Impôts, la Banque de France, auxquels il faut bien ajouter, aussi l’Education Nationale, la SNCF. Cela fait, au total plusieurs centaines, voire plus de 1000 emplois, qui risquent de disparaître. Une action régionale accentuée s’impose donc. Quelles que soient les limites imposées par l’État au déploiement de l’action régionale dans les dispositions restrictives introduites dans la loi de décentralisation, la mise en chantier d’un schéma régional du développement économique est une bonne chose, surtout s’ il s’agit bien d’un schéma de développement de l’activité économique et de l’emploi. La question de l’efficacité économique et sociale, de l’impact sur la création et le développement de l’emploi qualifié, les retombées sur les territoires, tout cela mérite que l’on se dote de moyens de mesures, d’examens des objectifs atteints au regard des ambitions initialement formulées. Quand il s’agit de création d’emploi, l’évaluation ne peut s’effectuer au vue des seuls critères qui sont ceux déterminés par l’entreprise, l’Etat ou la Région mais combiner une vision économique et sociale. Ces critères d’évaluation permettraient de faire évoluer plus finement les politiques publiques, dans un temps plus court et en tenant compte des enjeux locaux ou de secteur. C’est un enjeu de démocratie et d’efficacité économique. Dans une conjoncture économique et sociale aggravée par les mesures gouvernementales qui nourrissent l’insécurité sociale, qui s’attaquent aux 35 heures, remettent en cause les droits sociaux, et le code du travail pour favoriser la flexibilité, la précarisation et la pression sur les salaires, ce schéma peut ouvrir une autre perspective, et la région, peut, avec l’appui de ses outils financiers, contribuer à mobiliser des ressources qu’il convient de mutualiser et d’orienter vers des projets d’investissements. L’action régionale peut amorcer cette politique dès l’élaboration du Schéma Du Développement Economique Régional. Je suis donc très attentif à ce qui se dit et particulièrement dans les ateliers auxquels nous avons participé et à ce qui se fait dans ce domaine. S’il a été beaucoup question dans les propos tenus des aides au développement, la question des créations d’emplois, celle des relations entre l’emploi et le développement économique et celle de la place des salariés dans l ‘élaboration des « stratégies entreprenariales » l’ont été beaucoup moins…sinon pas du tout !!! Exit aussi la place des hommes et des femmes dans ce processus. Exit l’homme alors qu’il doit être au cœur de nos préoccupations. Exit l’homme bien soigné, bien formé, bien payé. Nous sommes encore loin d’un choix de société qui fait le pari de l’épanouissement des individus, celui de l’émancipation humaine, de l’intelligence et des savoirs collectifs qu’il convient de gagner. La Région Haute-Normandie s’honorerait de tenir sa place en ce sens. Ce sont évidemment des points qui ne saurait être occultés dans la suite de ces journées et nous y veillerons. Nous y veillerons d’autant plus que -seconde remarque-le contexte politique général ne conduit pas à l’optimisme. L’ampleur et le succès des mouvements engagés cette semaine pour l’emploi en sont la preuve. Si l’offensive générale du gouvernement Raffarin sous l’aiguillon du MEDEF contre les dispositions du droit du travail et contre la législation des 35 heures au nom de la flexibilité, de la souplesse et de la liberté d’entreprendre, ne donne aucune garantie en matière de création d’emploi, elle donne par contre l’assurance d’une nouvelle poussée vers la précarité du travail et de déstabilisation des salariés. Ce sont là de biens médiocres facteurs de développement pour tout dire inacceptable d’où notre volonté que dans les semaines qui viennent soit élaboré un plan d’attribution des aides solidement amarrés aux créations d’emplois et à l’élaboration démocratique des procédures d’attribution et de leur contrôle. La région pourrait par exemple, travailler à la mise en place de cellules de prévention des plans sociaux permettant d’anticiper tout mouvement touchant aux structures de l’emploi : L’OBSERVATOIRE REGIONAL que nous avons, nous aussi, demandé, va dans ce sens. Et je ne fais là que reprendre des propositions que Claude Lainé au nom du groupe communiste a déjà avancés plusieurs fois dans cette salle. Elle pourrait conditionner ou moduler les aides aux entreprises si ces dernières décidaient de donner un prolongement aux politiques régionales. Exemple au niveau des transports. Des aides plus importantes pourraient être mises en place en contrepartie d’un Plan de Déplacement d’Entreprise favorisant l’utilisation des transports publics. La Région pourrait interpeller les pouvoirs publics pour obtenir des moratoires suspensifs aux plans sociaux et la réunion de tables rondes sur les projets alternatifs. Elle pourrait, d’une façon générale, affirmer sa détermination à soutenir l’action des salariés contre les licenciements ou les transferts et destructions d’emplois et recourir à des études et expertises à la disposition des comités d’entreprises et des collectivités locales en amont des projets de restructuration et des plans sociaux. Est-il est possible d’étudier, dans cette perspective, comme la proposition en a été faite dans d’autres régions, la tenue d’une conférence financière ayant pour vocation de travailler à la constitution d’un fonds régional permettant de mutualiser des fonds publics et privés pour l’investissement, l’emploi et la formation. De même, le champ de l’économie sociale et solidaire doit, me semble t’il, être investi par les aides régionales et le soutien à la recherche et aux chercheurs doit être évalué. Je souhaite que ce travail de concertation soit lui-même ambitieux, qu’il rassemble effectivement, sur le terrain, tous les acteurs concernés, au plus près des réalités difficiles qu’ils affrontent, pour un travail dont il nous appartiendra de tirer toutes les conclusions opérationnelles. Ce sera tout pour aujourd’hui ! Jean-Paul LECOQ
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